Michael Jackson est mort, la croissance est partie avec lui…

Quelle belle histoire cette croissance économique. Ça va, ça viens, ça s’en va et ça reviens… mais malgré toutes les politiques monétaires et les règles de ciblage de croissance en vogue aux USA, ça fluctue. Alors certes, nous n’en sommes pas au marasme de 1929, mais les comparaisons existent bel et bien.

Allons, il y a des bonnes nouvelles tout de même: l’Australie qui augmente ses taux d’intérêt directeurs. L’augmentation du coût de l’argent est une première pour la Banque Centrale Australienne (RBA) depuis mars 2008. C’est d’ailleurs la première Banque centrale d’une économie des grands pays développés à augmenter ses taux depuis le début de la crise financière. Et ce avant même que la Réserve Fédérale américaine (Fed) ne donne le ton.

La nouvelle a d’ailleurs surpris nombre d’analystes, la plupart ayant tablé sur une hausse des taux dans seulement quelques mois. Le Gouverneur Glenn Stevens a estimé dans un communiqué qu’étant donné que « la croissance va probablement se rapprocher de son rythme de croisière au cours de l’année à venir, que l’inflation se rapproche de l’objectif fixé et que le risque d’une grave contraction économique en Australie est maintenant derrière nous, (…) il est aujourd’hui prudent de commencer à diminuer progressivement l’impulsion fournie par la politique monétaire ».

OK, c’est génial. Mais est-ce que cela veut vraiment dire quelque chose ? L’Australie, c’est loin, tout comme la connaissance du rythme de croisière de la croissance d’un pays ! (à un an !!!, c’est mieux que Madame Soleil…) Donc prudence. Il faut focaliser son attention sur le mot « probablement ». Cette baisse a donné des signaux positifs aux marchés en ce début du mois d’Octobre, mais ces signaux sont-ils justes par rapport à cette probabilité ? Ou plutôt, le filtre (des mauvais signaux) ne va-t-il pas tarder à arriver, et recadrer peut-être plus sévèrement les marchés ? En tout cas, la croissance mondiale n’est pas au rendez vous, tout comme sa « juste » mesure (et sa mesurabilité ?).

Car encore plus étonnant que cette montée de toux, euh pardon, de taux, le Rapport Stiglitz sur la mesure de la croissance. Bon, tout le monde s’accorde à dire et répète qu’il s’agit d’une avancée majeure dans la comptabilité de la croissance. OK, c’est génial ça aussi. D’ailleurs, on y avait vraiment pas pensé. Nos étudiants en économie le savent: je suis ironique car ils n’auraient pas eu leur Master 1 sans savoir que l’IDH tiens une place importante dans la comptabilité de la croissance des pays en développement. L’IDH ? What’s that ?

C’est l’Indice de Développement Humain qui est un indice statistique composite, créé par le Programme des Nations unies pour le développement (PNUD) en 1990, évaluant le niveau de développement humain des pays du monde.

Le concept du développement humain est plus large que ce qu’en décrit l’IDH qui n’en est qu’un indicateur créé pour évaluer ce qui n’était mesuré auparavant qu’avec imprécision. L’indicateur précédent utilisé, le PIB par habitant, ne donne pas d’information sur le bien-être individuel ou collectif, mais n’évalue que la production économique. Il présente des écarts qui peuvent être très importants avec l’IDH. L’indice a été développé en 1990 par l’économiste pakistanais Mahbub ul Haq et l’économiste indien Amartya Sen. Pour Sen comme pour le PNUD, le développement est plutôt, en dernière analyse, un processus d’élargissement du choix des gens qu’une simple augmentation du revenu national.

Alors là certains pensent que j’ai pompé un paragraphe du Rapport Stiglitz. Je vais répondre franchement, j’ai pompé… WiKiPédia !!! Comme vous pouvez le constater, il ne se passe pas une journée sans que l’on parle de ce superbe rapport Stiglitz sur cette différente manière de mesurer la croissance. Mais cela fait presque 20 ans que l’ONU l’utilise pour les pays en voie de développement et ce n’est que maintenant que l’on en parle ? Faut-il un coup de pied au … au système politique ou économique pour réviser ses classiques de Master 1 (Maitrise) ? Autre explication: on nous prend pour des … en prétextant que le rapport Stiglitz est différent de l’IDH. Pour les initiés, on sait que l’IDH dépend de celui qui l’utilise, et des coefficients qu’il attribue lors de sa calibration. Donc aux pondérations près, le Rapport Stiglitz à déjà 20 ans 😉

Pour clôturer cet article, un extrait intéressant concernant le Rapport Stiglitz:

Le rapport final de 291 pages, que Le Figaro s’est procuré dans sa version anglaise, préconise de revoir de fond en comble les modes de calcul de la croissance. Il ne s’agit pas à proprement parler d’une révolution : tous les indicateurs mis en avant par la commission existent déjà, qu’il s’agisse par exemple de la mesure de la santé des individus, de leurs habitudes de consommation, de leurs revenus, de leur patrimoine ou encore de leur consommation de loisirs. Mais, selon la commission, il faut changer de méthode. «Aujourd’hui, lit-on en préambule du rapport, l’accent est mis sur le calcul du PIB, alors que l’analyse du produit national net – qui prend en compte la dépréciation des moyens de production – ou le revenu net des ménages peuvent être plus pertinents ». Bref, «le PIB n’est pas faux en soi, mais peut être faussement utilisé».

Parmi les nombreuses pistes qu’elle étudie pour mieux décrire la réalité économique, la commission insiste plus particulièrement sur trois sujets. D’abord, remettre les individus au centre de toute analyse. S’il ne connaît pas la situation réelle des ménages (richesse, bien-être…), un dirigeant politique «est comme un pilote sans boussole». Et les mesures qu’il prend peuvent avoir l’effet inverse de celui escompté. À cet égard, la notion de qualité de vie est centrale. «Les embouteillages peuvent accroître le PIB puisqu’ils entraînent une augmentation de la consommation d’essence, mais pas le bien-être», ironise la commission.

Deuxième axe fort : les statistiques doivent mieux valoriser le montant des transferts en nature de l’État vers les ménages. Les dépenses de santé, d’éducation ou de sécurité, par exemple, sont comptabilisées en fonction de leur coût d’entrée, c’est-à-dire le nombre de médecins, de professeurs ou de policiers. Mais le bien-être et le développement qu’elles procurent, générateurs de richesses supplémentaires, sont trop rarement pris en compte. Le faire permettrait de calculer différemment la croissance des pays les uns par rapport aux autres, favorisant ceux où la dépense publique est la plus efficace, donc la plus productive. Enfin, la mission Stiglitz revient longuement sur la question du développement durable. Les économistes se montrent critiques sur la jungle des indicateurs existants dans le monde pour tenter de mesurer l’impact sur l’environnement de la croissance. Et estiment urgent de revenir à des critères simples : le développement durable est celui qui laisse davantage aux générations futures qu’aux générations présentes !

Technique au premier abord, le rapport Stiglitz se révèle, au final, d’une grande modernité : il dépeint un monde où la situation de l’individu prône sur celle de la nation…

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3 comments for “Michael Jackson est mort, la croissance est partie avec lui…

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